Me rendre indisponible au monde

15 jours en pleine forêt

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À l’aube de mes 45 ans, je me suis offert 2 semaines, seul, dans notre refuge en pleine forêt.

Ces dernières semaines, j’ai beaucoup lu d’écrits d’Hartmut Rosa, et j’ai notamment été touché par les notions de " Rendre indisponible le monde" et de "résonance". Ma quête était là, me rendre indisponible en retrouvant un lien de résonance avec la forêt.

Le schéma ci-dessous résume ce que j’ai retenu de ces lectures et explicite l’impulsion qui m’a guidée.

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Pourquoi est-ce que j’entreprends ce périple ? 15 jours seul, dans le refuge, avec un contact limité vers l’extérieur. Pourquoi faire le vide dans mon agenda pour vivre ce temps ? La clé est là ! Le vide… Faire le vide ! Avec cette évidence, dès le premier jour, ici, m’est venue cette question au regard de mon planning chargé des derniers mois : par quoi est-ce que je comble le vide ? Quelle peur me fait vivre le trop ?… Trop de nourriture… Trop d’activités… Trop de sport…

Ma première journée ici, était révélatrice : quatre heures de marche le matin… Deux heures et demie de vélo l’après-midi… Le tout avec un genou inflammé !…Le lendemain, ce dernier s’est réveillé, me forçant à rester au repos. Dois-je attendre la douleur pour me limiter ? Qu’est-ce qui me fait vivre l’excès ? Quels sont mes besoins derrière cela ? Et si ce vide était plein ? Dans cette dernière question, il y a une piste pour moi. Quelle peut être la consistance de ce plein ? De quoi est-il composé ?

Au bout de deux semaines, au moment de quitter le refuge, est venu le temps d’apprendre de voir ce qui émerge. Deux pistes se proposent à moi. En observant mon vécu sur ces quelques jours, je vois que le vide se nourrit de mouvement…D’action… Cette dernière a un moteur lié à la confiance est un autre lié à la peur. Par exemple, lorsque je fabrique la hutte de sudation, ou que je cueille des champignons… Je suis dans un état de créativité, l’action est joyeuse et spontanée. Je ne compte pas le temps, j’essaye, je recommence, j’améliore… Lorsque je suis pris à la tâche, les choses sont simples, je ne vois pas le temps passer… Je suis comme dans un État de Flow où les choses se font par évidence d’une manière instinctive. Ici, ce que je remarque, ce sont souvent des moments où je fais des choses simples avec un bout de bois et un bout de ficelle. Je suis dans un état de satisfaction et de confiance et de joie. Le vide est plein par ma créativité. Je m’abandonne à elle. À la fin, un sentiment de bien-être est présent et j’ai envie de partager avec d’autres personnes (pour la hutte, j’ai envoyé une quinzaine d’invitations aux amis du secteur à venir l’essayer…). Le vide se comble alors par la confiance, et, en cela, il est plein, car je recherche pas à le remplir.

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À l’inverse, lorsque je suis dans la peur, l’angoisse ou l’anticipation… Je comble ce vide par un excès. Plusieurs fois, je ne me sentais pas bien, mal à l’aise dans le refuge, notamment quand la peur qu’il puisse m’arriver quelque chose était présente (une personne malintentionnée… Un chasseur…) alors je me mettais dans le mouvement. Souvent un mouvement pour aller acheter quelque chose. J'avais en tête qu’il me fallait quelque chose… À manger… Un ustensile… Un outil… En-tout-cas mon bien-être était lié à un objet extérieur et cette quête me mettait alors en mouvement. Quitte à faire des kilomètres et des kilomètres. Je comblais alors le vide pour ne pas vivre la peur par un besoin créé de toute pièce.

À partir de cette réflexion, voici ce que je me souhaite :

Observer la source de l’action : est-ce la peur ? Est-ce la confiance et la joie ?

Observer mes peurs et identifier le besoin derrière.

Transformer la peur en revenant à geste simple (ficelle, couteau, bois…).

Pour voir le journal de bord complet avec les photos: mon journal de bord sur polarsteps